Le matériel utilisé avec les enfants
En ouvrant l’une ou l’autre des livres qui contiennent les histoires de philosophie pour les enfants, on constate que chaque page est remplie de ce dont ont traité les philosophes qui ont écrit et marqué l’histoire de cette discipline. La plupart des concepts philosophiques examinés au collège ou à l’université sont introduits dans ces histoires d’une manière qui appelle le dialogue, la réflexion et la recherche. En outre, ces histoires sont écrites dans un langage compréhensible pour les enfants. On n’y trouve aucun nom de philosophes (sauf en deux occasions sous forme de jeux de mot). Encore moins cette terminologie parfois technique que certains philosophes utilisent à l’occasion.
Le but n’est pas de transmettre aux enfants ce que des adultes, avec leur langage, auraient déjà pensé pour eux. Il est plutôt d’encourager les enfants à penser philosophiquement, c’est-à-dire à penser de façon rigoureuse, avec impartialité, objectivité et respect des raisons avancées par les pairs, tout comme le font les philosophes, mais avec un langage et des centres d’intérêts qui conviennent aux enfants.
Si l’on souhaite aider les enfants à franchir la distance qui, trop souvent, sépare l’étonnement de la réflexion, la réflexion du dialogue et le dialogue de l’expérience, encore faut-il que cette expérience leur soit présentée dans un contexte qui est à l’image de ce qu’ils peuvent vivre quotidiennement. Les romans sont donc des instruments qui donnent aux enfants l’occasion d’avoir un premier contact avec la réflexion philosophique. En présentant, sous les traits des personnages, ce que bien des philosophes dans l’histoire ont su poser comme question (et parfois offrir comme réponse), ils fournissent un exemple de ce que peut apporter la pratique de la philosophie dans la vie de tous les jours.
Les guides pédagogiques, de leur côté, offrent une série de plans de discussion et d’exercices qui permettent, respectivement, de mettre l’emphase sur la clarification d’un concept ou sur la pratique d’une habileté cognitive particulière. Par la diversité des moyens qu’ils contiennent, ils permettent aussi d’inviter les enfants à envisager différentes positions ou questionnements philosophiques issus de l’histoire de cette discipline.
La multiplicité des perspectives s’explique à la lumière de l’un des objectifs de cette approche qui n’est pas d’amener les enfants à souscrire, malgré eux, à une philosophie en particulier, mais plutôt d’exercer leur jugement à l’aide de modèles ou de tentatives de réponses que fournit la pratique de la philosophie depuis ses débuts. Par le biais des plans de discussion, ces guides permettent donc de donner une direction à la recherche afin que les enfants puissent examiner, au passage, des idées fondamentales qui ont fait l’objet des réflexions des philosophes au cours des siècles.
Mais, ce matériel, à lui seul, ne saurait suffire si le but visé est la pratique de la philosophie avec les enfants. Encore faut-il pouvoir créer des conditions philosophiques– d’autres diraient pédagogiques– à l’avènement de cette pratique. Encore faut-il envisager des manières de procéder qui permettent aux enfants d’ouvrir la bouche et de manifester, d’une manière de plus en plus réfléchie, l’étonnement que suscite leur expérience, le merveilleux qu’elle contient, les problèmes qu’elle soulève et les solutions qu’ils peuvent leur apporter.
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