• L’exposition Penser: une expérience philo à la Grande bibliothèque de Montréal, section jeunesse

On la découvre avec étonnement cette exposition!  On ne s’attend pas à une exposition portant sur la philosophie qui s’adresse à des enfants.  Et on la voit de loin… de très loin, ou de très haut… Au loin… sur le mur, le grand mur, il est écrit tout en couleurs:  PENSER! On tourne le regard et on est encore surpris… on voit des enfants (et des adultes) qui manipulent des boutons, qui écrivent sur des coeurs, qui se déforment dans des miroirs, qui regardent des bouts de films, qui se comparent, qui rigolent, qui se parlent… qui dialoguent, entre eux, avec leurs parents.  On est loin, très loin, d’une salle de classe dans laquelle des enfants seraient en train de se faire dire quoi penser.  Rien à voir!  Ici, tout est vivant!  Les mots sont vivants!

Cette exposition, elle :

est unique: je n’en connais pas d’autres dans le monde.  Il y a eu une exposition dans un musée à Barcelone en lien avec la philo pour enfants il y a plusieurs années, autour d’une créature mystère (si mes souvenirs sont exacts), mais rien qui se compare à l’exposition à la BanQ.

–  est courageuse: même si la philosophie pour les enfants est reconnue par l’UNESCO comme étant une activité importante en éducation, il y a encore beaucoup de personnes qui estiment que les enfants ne sont pas capables de faire de la philosophie. L’exposition montre que cela est possible et même souhaitable et que l’idée que les enfants ne sont pas capables de philosopher relève du préjugé, ou à tout le moins d’une conception de la philosophie qui est très différente de celle qui est présentée dans l’expo.

– propose une expérience du questionnement.  La philosophie n’est pas présentée comme une somme de réponses à apprendre concernant des questions que d’autres se sont posées, mais comme une marche, un mouvement visant à se poser des questions.  Mais elle ne se réduit pas, non plus, uniquement à l’élaboration de questions (comme c’est trop souvent le cas lorsqu’on pense aux liens entre la philo et les enfants en disant que les enfants aiment poser des questions).

– propose une expérience de la pensée.  Loin de gaver le cerveau des visiteurs, cette exposition (ce laboratoire) les invite à penser et, qui plus est, à penser par et pour eux-mêmes. Il n’y a pas de contenu précis qui est transmis dans cette exposition.  Il s’agit d’une invitation à s’engager dans un processus, une enquête.  Celui-ci est plus important qu’un contenu qui devrait être transmis. Certes il y a matière à penser dans cette exposition, mais cette matière est là pour provoquer la réflexion et non pour l’arrêter.

– engage une expérience du dialogue.  Plusieurs activités invitent les participants à s’engager dans un dialogue avec d’autres participants.  Cette expo nous ramène à ce que plusieurs considèrent être au coeur de l’acte de philosopher (et celui de penser): le dialogue (avec les autres, mais aussi avec soi-même). Un dialogue à deux, à trois, à plusieurs…

– montre, par les activités suggérées tout au long de la marche, qu’on ne saurait s’engager dans l’activité de philosopher sans être en même temps engagés dans l’expérience de la créativité. Être philosophe, c’est avoir sa vision des choses, laquelle doit être créée par chacun.

permet de faire le pont entre les générations. Même si l’exposition s’adresse d’abord aux enfants d’un certain âge (8-12 ans), elle éveillera sans doute l’intérêt et la curiosité des parents et  pourrait leur donner envie de s’engager dans une discussion avec leurs enfants autour des thèmes abordés dans l’exposition.  Il n’y a pas d’âge pour s’interroger sur des questions touchant l’essentiel de l’expérience humaine.

– est en ligne droite avec les propos de Montaigne: une tête bien faite plutôt que bien pleine.  Nous avons les connaissances au bout des doigts aujourd’hui (Internet).  Nul besoin d’un prof dont la tâche unique serait de transmettre l’information.  Qui plus est, bien que nécessaires, les connaissances ne suffisent pas.  Encore faut-il pouvoir les traiter de manière critique et avec créativité.  Dans ces conditions, être éduqué veut dire: non pas posséder une somme de savoir, mais être capable de faire preuve de jugement.  L’exposition  va dans cette direction.

fait le pont avec la littérature actuelle pour la jeunesse: l’expo montre comment certains livres pour enfants (qui n’ont pas nécessairement été écrits en vue de faire de la philo avec les enfants) peuvent être utilisés pour inviter les enfants à explorer des questions existentielles qui les préoccupent.

– montre qu’il y a une nouvelle littérature qui est en voie de création permettant d’inviter les enfants à penser par et pour eux-mêmes en philosophant (au Québec, notamment, les romans de la Traversée).

offre des outils pour l’éducation philosophique des enfants (mise en bouche…). Elle ne permet pas de combler les lacunes de l’éducation philosophique à l’école mais permet d’entrevoir, mieux que bon nombre de conférences, que la pratique de la philosophie pourrait faire partie des activités éducatives de l’école.  Elle est une introduction à cette idée que la pratique de la philosophie à l’école pourrait servir à la formation de la pensée des enfants.

montre que les enfants devraient être invités à réfléchir sur la société dans laquelle ils se trouvent et dans laquelle ils auront un rôle de plus en plus important à jouer.

est  un hommage à l’intelligence des enfants.  L’exposition, le laboratoire pour penser, permet de reconnaître que les enfants ont beaucoup  à dire lorsqu’il est question de l’expérience humaine consistant à vivre le mystère de l’existence (Qui sommes-nous? Dans quoi sommes-nous?)

Un rendez-vous pour petits et grands!

http://www.banq.qc.ca/a_propos_banq/salle_de_presse/communiques_de_presse/2013/communique.html?c_id=4795d39f-d71c-4ea9-8e0d-30f0e07e61e4

%d blogueueurs aiment cette page :