Je m’inspire librement ici des écrits (Prolégomènes à la linguistique structurale 1) de Gustave Guillaume, linguiste français, qui ne connaissait rien à la philosophie pour enfants mais qui a vu, me semble-t-il, et sans le savoir va sans dire, de très loin ce qui se joue en philosophie pour enfants.

La position de l’enfant pensant dans une communauté de recherche à l’endroit de l’Univers est celle, regardante, d’observateur. Ce n’est pas l’univers qui regarde et observe les enfants, ce sont les enfants qui regardent et observent l’univers. Il suit de là que l’univers de représentation (les outils de la pensée que propose la pratique de la philosophie) que les enfants construisent en eux est, comme eux-mêmes, comme leur propos pensée à laquelle cet univers s’intègre, une construction non pas regardée mais regardante.  Aussi bien, les actes d’expression présents dans le dialogue en communauté de recherche que la possession de cet univers de représentation (univers d’outils de la pensée) ne nous entretiennent pas de ce qu’est en soi cet univers de représentation (à moins de le prendre comme objet), mais de ce que, grâce à lui, il est possible aux enfants de connaitre de l’univers réel. Ce que disent les enfants en communauté de recherche, les actes d’expression, ne nous parlent pas des actes de représentation (outils de la pensée) dont ils émanent: ils nous parlent de ce que ces actes de représentation nous font voir de l’univers réel. Mais si on veut aller au fond des choses dans ce domaine, il importe d’inviter les enfants à regarder leur univers regardant et à parler de cet univers afin d’en prendre de plus plus conscience et éventuellement d’en corriger le tir.  C’est ce qu’on pourrait appeler: former la pensée! La lucidité demande de prendre un peu de recul.