Parodie d’une communauté de recherche philosophique!

En juillet dernier, le dernier cours du microprogramme en philosophie pour enfants offert conjointement par l’Université Laval et l’Institut de l’École internationale de Genève a conduit l’une de ses participantes, Anne-Laure Robine, à écrire, en quelque sorte, une parodie d’une communauté de recherche philosophique.  Quelle ne fut pas ma surprise de lire ce texte qui coïncidait justement avec mon anniversaire!  Merci Anne-Laure et tous ceux et celles qui ont participé, d’une manière ou d’une autre, à la création de ce magnifique petit texte.


« Diplômée d’une école de commerce (ESSEC), Anne-Laure est directrice adjointe d’une fédération d’associations françaises qui accompagnent l’insertion professionnelle de personnes par la création de leur propre entreprise. Passionnée de philosophie et de philosophie pour enfants, elle a suivi le microprogramme de philosophie pour enfants de l’Université Laval dispensé à Genève en 2016-2017, en partenariat avec l’Ecole internationale. »

  • Sarah: Dites, j’ai une question qui me brûle comme un feu dévorant, j’ai besoin de la partager avec vous : ça veut dire quoi « vieillir » ?
  • Cédric: Vieillir, c’est se rapprocher doucement de la fin de sa vie. Parce que, vois-tu, la vie, ce n’est pas une autoroute à double sens. Une fois dans la voiture, il n’y a pas de marche arrière, répond Cédric avec une pointe de malice.
  • Sarah: Mais, ça veut dire que chaque seconde qui passe nous rapproche de la fin alors !

Sarah était tout-à-coup prise d’un sursaut d’angoisse…

  • Cédric: Oui. C’est le principe…
  • Anne-Sophie : D’où l’importance de bien user de son temps. Si on pouvait revivre chaque seconde à l’infini, vivrait-on la même vie ?
  • Michel: Anne-Sophie, quelle habileté viens-tu de mobiliser, là ? Ne serait-ce pas une magnifique hypothèse ?
  • Anne-Sophie: …ou un doux rêve ?
  • Marylène : oh, oui, rêvons ! trêve de doux vieux, rêve de doux cieux !
  • Marjorie: plus prosaïquement, je voudrais développer l’hypothèse d’Anne-Sophie. Car depuis le début de cette CRP, on voit le temps qui passe comme un axe chronologique, mais j’aimerais l’envisager sous l’angle spatial. Si on prend cet axe, non pas comme un repère chronologique, mais comme un absolu qui s’auto-régénère à l’infini en tournant sur lui-même, alors le temps est un espace clos où tout peut se rejouer plusieurs fois. C’est une question d’immanence phénoménologique.*silence*
  • Michel: quelqu’un veut développer l’idée de Marjorie ?
  • *silence*
  • Michel : oui Marylène ?
  • Marylène: Depuis le début, je vous écoute, mais je crois que je n’arrive pas à bien cerner le sujet : le sujet de la CRP, si je sais lire au tableau, c’est « comment souhaiter un bon anniversaire à Michel ». Et tout de suite, on a embrayé sur la définition de vieillir. Mais qui a dit que le jour de ses 60 ans, on vieillit d’une année? Pourquoi ne pourrait-on pas dire qu’on grandit?
  • Maylis : Moi je suis d’accord avec Marylène. Et j’aimerais faire une distinction entre l’âge du corps et l’âge mental. Peut-être que le corps, lui, prend les marques du temps. Mais l’esprit, lui, il ne peut que grandir : plus on le nourrit, plus il grandit ! Ah non mais attendez…je m’autocorrige : si l’esprit grandit comme un être vivant, alors il peut aussi mourir…S’il y a vie, il y a mort non ? La mort ne serait-elle pas un présupposé de la vie ? ou peut-on vivre sans mourir ?
  • Muriel: personne n’a encore réussi je crois !

* sourires attendris*

  • Anne-Laure: Donc, si on reprend la définition de Maylis, quand on fête les 60 ans de Michel, on fête surtout un esprit qui a beaucoup grandi. Mais je m’interroge : est-ce que l’esprit peut atteindre la maturité, ou un âge adulte, comme le corps ?
  • Rosalina : Est-ce que c’est ce qu’on appellerait l’âge de raison ?
  • Christelle: J’espère qu’il n’y a pas d’âge pour être raisonnable ! S’il faut atteindre un certain âge avant de savoir utiliser sa raison, je me demande bien ce que nous faisons tous ici en cercle à essayer d’apprendre aux enfants à penser par et pour eux-mêmes.
  • Muriel : je partage…et j’ai envie de rajouter : parfois, être raisonnable, c’est se laisser vivre ; même si vivre implique une forme d’excès. Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais…
  • Marylène : vite, hâtons-nous d’être ivres, ivres de vivre, vive l’ivresse de vivre !
  • Sarah : D’ailleurs, je crois bien que le temps n’a rien à voir dans cette affaire… je vais prendre un exemple : parfois, quand je suis à la caisse d’un supermarché, j’attends 5 minutes, mais ça me paraît durer 2 heures ! Et quand je suis en classe avec mes élèves, je n’ai pas fini de donner la consigne que le cours est déjà terminé!
  • Charlotte : tu veux dire qu’il faudrait faire la distinction entre temps et durée ?
  • Sarah : oui, je crois.
  • Véronique : je partage cette distinction. Pensez au vin par exemple : il ne s’agit pas de le faire vieillir le plus longtemps possible. Chaque bouteille a sa courbe de temps. L’apogée d’une bouteille sera pour certaines à 30 ans, d’autres à 5. Comme le vin, chaque personne a son histoire, et elle peut nous bonifier. Je dis bien : « peut » !
  • Anne : pour la musique, cette distinction fonctionne aussi ! Le temps, il s’aborde de deux manières, par sa vitesse, le tempo, mais aussi par la durée variables des notes…D’ailleurs, vous savez comment on appelle la durée des notes ? La « valeur »…la musique a choisi son camp…Ah, que j’aime ce langage!
  • Nadège : d’ailleurs, le temps, ce n‘est qu’une convention finalement. Regardez, moi qui arrive tout droit du Mexique, lorsque je ferai mon voyage retour, je vais vivre deux fois la même journée ! Pourtant, est-ce que je vais vivre deux fois la même chose ? Non…
  • Cécile : hop hop hop là ! vos failles spatio-temporelles, elles me filent le vertige. Pour moi, les gens n’ont pas d’âge. Le cœur n’a pas d’âge. Qu’une personne ait 60 ou 10 ans, je m’en fiche. J’aime son cœur, pas ses rides.
  • Muriel : mais le cœur, je veux dire, pas le cœur organe, mais le cœur de l’âme, vous croyez que lui, il ne meurt pas ?
  • Anne-Sophie : non, je ne crois pas. Même après la mort, je pense que le cœur de chacun continue de vivre à travers les cœurs qui battent encore.
  • Muriel : Donc, d’une certaine façon, quand on aime, on devient immortel ?
  • Anne-Sophie : oui. Je ne sais pas si c’est la vérité. Mais c’est la mienne.
  • Muriel : mais même si tu te racontes des histoires, ce que tu vis est bien réel non ? donc si c’est vrai, pour toi, pour ton cœur, alors c’est vrai. Chaque histoire a une part de vérité…
  • Marylène : oh, il me vient une idée ! j’ai une proposition de syllogisme, attendez : la vérité du cœur ne raconte pas d’histoires. Or, le cœur a toujours raison…Donc ? donc… ah ! Qui peut m’aider?
  • Charlotte : Donc : la vérité a toujours raison !
  • Anne-Sophie : celle du cœur, oui.
  • Frédéric : alors, peu importe que l’on vive 1, 10 ou 60 ans, pourvu que l’on vive vrai.
  • Clara : Donc, si on résume, souhaiter un bon anniversaire à Michel, ce n’est pas lui souhaiter un multiple de 365 jours. C’est lui souhaiter d’être heureux, chaque seconde qui passe. D’être intensément heureux. Et pour ça, il faut beaucoup d’amour vrai : l’amour de la vie, de la philosophie, des amis, de la sagesse, l’amour sous toutes ses formes ; mais l’amour.
  • Emmanuelle : oui, mais je me permets de rajouter un point : aimez, mais ne le dites pas trop souvent non plus. Faites !
  • Frédéric : Les enfants, je suis au regret de vous interrompre dans nos intenses réflexions, mais l’heure tourne, et je sens que demain je serai obligé d’attendre certains retardataires sur le parking. Alors, Michel, avec tout notre cœur et toute notre intensité du moment, nous te souhaitons :
  • TOUS ENSEMBLE : UN BON ANNIVERSAIRE !

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