Il est très fréquent d’associer la philosophie pour enfants au développement cognitif de ces derniers. Et plusieurs raisons justifient ce rapprochement. En effet, la pratique de la philosophie avec les enfants permet à ces derniers de développer une multitude d’habiletés de penser regroupées sous 4 habiletés génériques: raisonner, rechercher, conceptualiser, interpréter. Chacune de ces habiletés permet à l’enfant d’apprendre à penser de mieux en mieux dans toutes les disciplines à l’école. Et il n’y a rien de surprenant dans tout cela puisque nous sommes, avec ces habiletés, au fondement même de l’acte de penser. La moindre amélioration ici a des répercussions partout à l’école et dans la vie hors école. Mais, s’en tenir au développement des habiletés de penser lorsqu’on aborde la philosophie pour enfants serait prendre la partie pour le tout.
En effet, cette pratique permet également aux enfants de développer un ensemble de dispositions qui, réunies, redistribuées et combinées aux habiletés de penser, donnent l’occasion de devenir, par exemple, de plus en plus soucieux d’avoir des principes, de bonnes raisons, des idéaux qui pourront guider nos actions. Ces principes, bonnes raisons ou idéaux ne sont pas transmis par l’enseignant.e, mais construits par les enfants eux-mêmes lors des différentes délibérations auxquelles ils participent en philosophie pour enfants. Persuadés du dedans que ceci ou cela a plus de valeur que ceci ou cela, la somme de leur réflexion n’est pas que théorique. Ils en viennent rapidement à avoir envie de passer à l’action. Grâce à des discussions profondes touchant la vérité, la beauté, la justice, le pardon, les croyances… en somme les grands critères de fond qui guident nos actions quotidiennes, les enfants donnent de plus en plus de sens à leur existence, un sens qui prend appuie sur leur intérêt pour les sujets discutés. Par là, ils développent, non pas une sagesse qui leur serait transmise, mais leur sagesse, laquelle est toujours soumise, dans une délibération philosophique, au regard critique de tous les autres qui y participent. Aucune sagesse transmise, mais le désir qui se développe de plus en plus de devenir de plus en plus critique de soi-même afin que l’auto-correction soit au fondement de cette quête de sagesse.
En philosophie pour enfants, la quête de la sagesse n’est pas étrangère au processus de recherche qui se déploie. C’est ce processus de recherche et les sujets discutés qui permettent à chaque enfant de se construire sa propre sagesse, pas celle que l’on voudrait bien lui vendre dans les livres, mais celle qui, selon lui ou elle, donne de mieux en mieux du sens à sa vie, laquelle n’est pas étrangère à celles que vivent les autres qui l’accompagnent dans ce vaste mystère qu’est la vie.