Analyse d’un dialogue en communauté de recherche philosophique

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Il me semble important que les personnes qui font de la philosophie avec les enfants prennent régulièrement le temps d’analyser les dialogues qu’elles animent. Grâce à cette analyse, ces personnes pourraient ainsi affiner leurs interventions et aider les enfants à devenir de plus en plus capables de penser par et pour eux-mêmes. À quoi peut ressembler une telle analyse? Afin de donner un exemple, je m’appuierai ici sur un dialogue tiré de l’un des romans de M. Lipman, soit l’une des parties du chapitre 6 de La découverte de Harry. Les enfants sont sur le point de s’endormir, mais une discussion s’engage sur la nature de l’esprit.  Le passage, un peu long, me semble particulièrement révélateur des caractéristiques d’une bonne recherche intellectuelle en communauté de recherche.  Une fois le dialogue présenté, j’en ferai l’analyse.

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L’une des tâches qui attend la philosophie pour enfants

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Quand on songe à la philosophie pour enfants, on voit peut-être des enfants assis en cercle en train de discuter d’un sujet qui les intéresse avec le souci de questionner, problématiser, conceptualiser, en somme: donner du sens à leur expérience.  Et c’est une image qui renvoie bien à ce qui se passe dans les classes où des enfants font de philosophie.  Mais on peut aussi, pour le théoricien et le praticien que je suis, penser à la tâche qui attend ceux et celles qui préparent ces ateliers de discussion. Et cette tâche vise notamment à préciser au mieux l’acte de penser en communauté de recherche, afin que cet acte, aux multiples contours, puisse, par la répétition, s’intérioriser et aider dès lors les enfants à penser par et pour eux-mêmes.  Mais encore? Lire la suite

La philosophie pour enfants: apprendre à penser par une pratique réflexive en communauté de recherche

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Les êtres humains, jeunes ou vieux, sont des personnes qui pensent et ressentent et qui pensent de façon autonome en même temps qu’en collaborant avec les autres. Les personnes entières, non pas uniquement les esprits, les corps ou les sentiments, devraient être le point de concentration de tout enseignement et apprentissage.

Voici une liste de stratégies qui pourrait être intitulées « penser » et qui deviennent de plus en plus présentes lorsque les personnes sont invitées à pratiquer la philosophie en communauté de recherche: Lire la suite

Comment bien observer ce qui se passe en philosophie pour enfants?

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Si, comme le disait le linguiste Gustave Guillaume, on veut expliquer quelque chose, encore faut-il le comprendre, et si on veut le comprendre, encore faut-il l’observer.  Ainsi, si on veut expliquer, à qui que ce soit, la philosophie pour enfants, le mieux que l’on puisse faire pour débuter, c’est d’observer finement ce phénomène.  Il en va ainsi comme dans toute science qui, pour être, prend son départ à l’observation.

Mais qu’y a-t-il à observer en philosophie pour enfants?  Lorsqu’on observe des enfants engagés dans l’acte de philosopher, on entend des mots, des intonations, des rires, des histoires. On voit aussi des regards, des gestes. Une première observation peut nous révéler ces aspects. Toutefois, si on pousse l’observation un peu plus loin, nous pouvons entrevoir, et sommes conduits à concevoir une autre réalité, non directement observable, un autre monde: celui des idées, celui des relations entre ces idées, celui des processus entrelacés que partagent ces personnes et où interviennent plusieurs habiletés de pensées et conduites sociales, voire affectives. Si ces dernières réalités ne sont pas observables directement, elles sont néanmoins concevables pour qui prend soin d’imaginer ce qui se passe sous les mots employés par les enfants.

Un point de vue à considérer au moment d’observer des enfants pratiquant les actes de philosopher est celui de la dimension sociale qui caractérise ces actes. Par dimension sociale, on peut entendre tout ce qui a trait aux rapports humains engagés dans ces actes. Peut-être faut-il voir, au premier chef de ces rapports, l’écoute et l’entraide qui se développent au moment de pratiquer la philosophie.

Un autre angle d’approche consiste à centrer son attention sur les habiletés de pensée qui sont en jeu dans cette pratique, au nombre desquelles figurent l’habileté à raisonner, l’habileté à rechercher, l’habileté à conceptualiser et à organiser l’information et l’habileté à communiquer, à s’exprimer, à interpréter (à traduire dans son monde le monde de l’autre). Chacune de ces habiletés est reconnaissable à un ensemble d’actes particuliers, de mots prononcés et inscrits dans le discours des enfants. Ainsi l’habileté à raisonner pourra s’observer au moment où des enfants exprimeront un « parce que », un « je me base sur ceci pour dire cela », etc. L’habileté à rechercher s’observera notamment au moment où des enfants seront en train de formuler des questions, des hypothèses, des contre-exemples. L’habileté à conceptualiser, à définir se traduira par des propos visant à préciser le sens des termes employés (par ceci, je veux dire ceci…). Enfin l’habileté à traduire pourra être observée, notamment, lorsque des enfants tenteront de redire en leurs propres mots ce que d’autres ont affirmé.

Ainsi, à la question : À quoi reconnaît-on que des personnes sont en train de faire de la philosophie ? la réponse pourra varier selon le point de vue choisi. À première vue, cela ne diffère guère d’une conversation entre des personnes qui semblent être des amis. On les entend échanger à propos de sujets, de questions qui les intéressent, dans un contexte où l’écoute et le respect sont de mise. Mais si on observe un peu plus attentivement comment les choses se passent, si on prend soin de varier les points de vue qui s’offrent à nous, on remarquera que les propos s’accompagnent d’un souci de raisonner ensemble, de partager l’information, de définir les termes employés, de dégager les présupposés, d’entrevoir les implications, d’envisager différents points de vue, de peser les valeurs des raisons avancées… La liste est très longue.

En somme, si on observe attentivement des enfants en train de philosopher, on les verra engagés dans une activité où pensée critique, créative et attentive sont en constante interaction, inscrites qu’elles sont dans le cadre social de la communauté de recherche. Ces relations, à la fois cognitives, sociales et philosophiques, pour ne nommer que celles-ci, montrent la richesse du processus qui est en jeu, un processus qui va bien au-delà de la simple conversation entre amis, puisqu’il s’agit d’un dialogue philosophique. Celui-ci, en philosophie pour les enfants, s’inscrit notamment dans le cadre d’une recherche délibérative, processus complexe exigeant le recours à plusieurs composantes formatrices d’un jugement qui se veut à la hauteur des aspirations d’une société visant une démocratie digne de ce nom, c’est-à-dire d’une démocratie composée de personnes ayant la compétence et le désir de juger d’une manière raisonnable.

Tiré et adapté de: Sasseville, M. et Gagnon, M. Penser ensemble à l’école. Des outils pour l’observation d’une communauté de recherche philosophique en action (2e édition), Coll. Dialoguer, Pul, Québec, 2012.

 

Qu’est-ce qu’une question philosophique?

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Une question philosophique, ça n’existe pas! Ou, pour le dire autrement: toute question peut, selon le traitement que l’on en fera, devenir la source d’une enquête philosophique.  Prenons trois exemples pour mieux saisir ce que j’en comprends. Lire la suite

Préservation du sens et de la vérité: deux piliers en philosophie pour enfants

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Matthew Lipman aimait à dire que son programme de philosophie pour enfants met l’accent sur le développement de 4 habiletés de penser génériques: raisonner, rechercher, organiser l’information et interpréter.  Mais il ajoutait que ces quatre habiletés reposent in fine sur deux habiletés fondamentales: celle d’inférer et de traduire. Voyons d’un peu plus près. Lire la suite

Un moment dans la vie d’une enseignante qui pratique la philosophie avec les enfants

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Il me fait grand plaisir de laisser la place à Victoria Moisan pour le prochain billet. Comme elle le dit d’elle-même: «Je suis finissante en enseignement préscolaire et primaire de l’Université Laval. Depuis le début de mon BAC, je cherchais une façon particulière d’entrer davantage en relation avec les élèves. Je voulais également leur permettre de réfléchir, de se développer pleinement et de les faire aimer l’école. Les communautés de recherche philosophique m’ont permis d’atteindre ces objectifs. Je crois réellement à cette démarche et c’est pourquoi je poursuis ma formation dans le microprogramme en philosophie pour enfants et avec SEVE Formation Canada.  Voici une petite tranche de vie d’enseignante qui me motive à faire mon métier: Lire la suite

XIVe Rencontre internationale d’animateurs de communautés de recherche philosophique

À nouveau, cette année, en juillet, un autre symposium sur la communauté de recherche philosophique qui aura pour thème cette fois la quête de sens.  Il sera précédé d’une semaine portant sur la communauté de recherche philosophique et la méditation pleine conscience.  Pour plus de renseignements, voir les affiches suivantes ou écrire à Michel Desmedt: michel.desmedt@skynet.be

 

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Programmes d’étude en philosophie pour enfants à l’Université Laval

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Programmes d’étude

Premier cycle universitaire

• Microprogramme en philosophie pour les enfants (15 crédits)

ORIENTATION

La Faculté de philosophie entend rendre l’étudiant apte à saisir la richesse des rapports qui existent entre la pratique philosophique et l’expérience éducative. En initiant l’étudiant à une pratique philosophique qui s’inspire des travaux du philosophe Matthew Lipman, ce microprogramme vise à trouver des moyens permettant d’éduquer des enfants et des adolescents afin qu’ils soient de plus en plus en mesure de penser par et pour eux-mêmes.

L’intuition et la philosophie pour enfants

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Autant il semble évident pour tout être humain que notre pensée s’engage fréquemment dans l’acte de raisonner, autant il n’est pas aussi certain que l’intuition fasse partie du bagage des outils que la pensée utilise pour appréhender le réel.  Pour certain,e,s, il ne fait aucun  doute que l’intuition existe, pour d’autres, elle est une chimère dont il faut se méfier. Et quand elle est envisagée comme quelque chose qui existe, les définitions qu’on en donne sont très variables.  Ainsi, pour Platon, l’intuition est la saisie immédiate de la vérité de l’idée par l’âme indépendamment du corps (voir le dialogue le Phédon).  À l’opposé, pour Épicure, l’intuition est la saisie immédiate de la réalité du monde par le corps indépendamment de l’âme (voir notamment Lettre à Hérodote).  Chose qui semble acquise pour ceux et celles qui en reconnaissent l’existence, l’intuition serait un mode du jugement qui permettrait de saisir directement ce qu’il en est.  Vue par certain.e.s comme un pressentiment, associée à l’instinct, à une petite voix intérieure, elle pourrait jouer un rôle important dans la quête de connaissance. Mais qu’en est-il de sa place en philosophie pour enfants?  Si elle existe, a-t-elle sa place dans cette pratique?  Regardons d’un peu plus près. Lire la suite

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